Hommage à Caroline Durand
Nous avons appris avec tristesse la disparition au mois d'octobre 2024 de Caroline Durand, conseillère livre et lecture à la Drac de Toulouse pendant de nombreuses années.
Tout au long de son parcours, Caroline a accompagné avec engagement les acteurs de la filière du livre et les missions du Centre régional des Lettres puis d’Occitanie Livre & Lecture.
Nous nous joignons ici aux hommages que lui rendent des professionnels dont elle a marqué le parcours.
Caroline,
La dernière fois que nous nous sommes rencontrés c'était en août dernier. Après un déjeuner chez toi nous sommes allés découvrir au musée des Abattoirs l'étonnante expo : "Artistes et paysans. Battre la campagne".
Nous avions échangé autour du si ancien et toujours si actuel sujet de la culture populaire, qui nous tenait à tous deux si à cœur.
Si j'avais pu prévoir... ! Mais encore une fois j'étais trop trop pressé par une réunion à la "Maison des Ecritures de Lombez" ; la MdE, cette aventure à laquelle tu avais dès ses débuts apporté tout ton soutien.
J'ai retrouvé dans mes archives cette dernière phrase de ton discours de départ en retraite, en janvier 2020, discours que tu m'avais demandé de lire pour toi. Il dit presque tout de ta trajectoire :
Dans un fidèle compagnonnage, j’ai tenté de faire avancer ou de faire grandir des initiatives,
d’être attentive à la richesse des plus humbles.
J’ai aimé travailler avec vous et je suis fière de qui vous êtes.
Salut Caroline,
Paul Claudel, président de la Maison des Ecritures de Lombez
Nous sommes à Rodez, à l’occasion du Prix Artaud, je revois Caroline déambulant à la suite du Théâtre de l’Acte sur les pas d’Antonin Artaud. Je la revois aussi pour un atelier d’écriture au Vieux Palais d’Espalion. Une autre fois cela se passe à la galerie du Château d’eau où j’animais une nuit de l’écriture et Caroline est là, écrivante jusqu’au petit matin. Et puis spectatrice fidèle de mes spectacles à la Cave Poésie René Gouzenne où elle rejoindra dès sa retraite notre conseil d’administration.
Caroline aimait les livres et aussi toutes celles et tous ceux qui les font vivre. J’ai eu le grand bonheur d’être accompagné par Caroline dans de multiples projets qui sans elle auraient eu du mal à exister. Je ne citerai que le projet au début des années 2000 de résidences d’auteurs dans huit musées* de Midi-Pyrénées (1 par département). Dès 2001 à la création de la Boutique d’écriture du Grand Toulouse, Caroline était à nos côtés pour défendre les ateliers d’écriture créative et permettre de porter le geste d’écrire dans les 24 communes du Grand Toulouse. Dans sa dernière carte postale du 11 août 2024, elle m’écrivait « nos souvenirs se jonglent »**. Une semaine avant de nous quitter, elle me commandait mon recueil Le motager de poèmes. Amicale et discrète, exigeante et fidèle, Caroline, pour toujours présente en nous.
* J’avais invité Jean-Luc Aribaud, Stéphanie Benson, Serge Pey, Yves Charnet, Dominique Autié, Jean-Hubert Gailliot, Bernard Molinié, autour des thèmes « Ecrire là où la muse est » ou « La visitation d’écriture ». Les 16 textes ont été édités par N&B
** allusion à mon site « le pays jonglé ».
Philippe Berthaut, poète
Il est rare, voire exceptionnel, qu’au long d’une collaboration de plusieurs années entre la direction artistique d’une association culturelle et la conseillère livre et lecture d’une Drac se nouent des liens d’une telle confiance dans la relation de travail comme dans la richesse et l’exigence des échanges. J’évoque ici ce qui m’a uni, et plus largement ce qui a uni toute l’équipe artistique et administrative de Confluences à Caroline Durand.
Dès sa prise de fonction, au tout début des années 2000, Caroline Durand a souhaité nous rencontrer en nos locaux de Montauban pour découvrir de plus près et sur le terrain notre projet artistique, le concept et l’organisation du festival littéraire Lettres d’automne à Montauban, approfondir dans le fond et la forme la diversité des actions menées non seulement dans le cadre du festival mais également tout au long de l’année en direction du public scolaire et étudiant du département de Tarn-et-Garonne (Une années de vive voix, Plaisir de lire, Un auteur-un Lycée, Une œuvre sur paroles).
D’une attention extrême aux contenus des projets, veillant aux accompagnements financiers et logistiques comme aux relations avec le personnel salarié, Caroline prenait également soin de conseiller sans peser ni moins encore exiger, en suggérant en douceur et intelligence. Bien sûr lui arrivait-il de s’emporter avec fougue (sans quoi nous n’aurions pas reconnu Caroline !) jamais sur le fond, toujours sur la forme, mais c’était toujours, ou presque, à juste titre et si nous nous disputions parfois c’était pour mieux goûter le plaisir de la réconciliation, souvent à table autour d’un verre.
Lorsque nous nous sommes engagés en 2004 sur la création et la réalisation d’un second festival, Histoire en toutes Lettres, croisant histoire et littérature, à Tournefeuille, en plus de Lettres d’automne, nous pensions que notre conseillère ne montrerait guère d’enthousiasme et nous mettrait en garde contre un excès de travail et de responsabilités, y compris vis-à-vis de nos salariés. C’était mal la connaître... Bien sûr elle nous a mis en garde mais en ajoutant « Allez, foncez, on verra bien ! »). Telle était Caroline Durand, coups de cœur et coups de gueule, excessive par nature, disponible par réflexe, généreuse par intelligence, toujours présente. Oui, Caroline était toujours présente sur les éditions du festival, sur les actions scolaires et autres. Cela aussi est exceptionnel.
Au moindre souci dans une relation avec tel ou tel partenaire, elle devenait alors la sagesse même, conseillant la diplomatie plutôt que l’affrontement, qui pouvait avoir de fâcheuses conséquences.
Lorsque Nicole Petit et moi-même avons souhaité nous retirer, en 2016, et organiser notre succession, Nicole de la présidence, moi-même de la direction artistique, et confier à Agnès Gros (salariée de Confluences depuis 2003) la responsabilité artistique du projet associatif, Caroline a suivi de très près cette période de transmission, nous soufflant même le nom d’un possible nouveau président !
Après son départ à la retraite, elle avait souhaité devenir membre de Confluences, en déployant ses mêmes qualités et cette fois de l’intérieur. C’est là que nous l’avons croisée pour la dernière fois. Son souvenir demeure vivant dans notre mémoire.
Maurice Petit, créateur et directeur artistique de Confluences et de Lettres d’automne de 1990 à 2016.
Caroline Durand a été membre au titre des personnalités extérieures du conseil du département Archives et médiathèque (DAM) de l’Université de Toulouse Le Mirail (UTM) dès son arrivée à la Direction régionale des affaires culturelles de Midi Pyrénées au tout début des années 2000 et jusqu’à son départ en retraite vingt ans plus tard. Le DAM est devenu le DDAME (département Documentation, Archives, Médiathèque et Édition) et l'UTM l'UT2J (Université Toulouse - Jean Jaurès) et Caroline est restée la même, fidèle et engagée. Elle a toujours manifesté un fort intérêt pour les formations aux métiers du livre et des archives dispensées par le DAM / DDAME et nous a soutenus avec courage et ténacité lorsque le soutien financier de la DRAC au DDAME était fragilisé.
La relation professionnelle que j’entretenais avec Caroline en tant que directrice du département est devenue un prétexte pour se retrouver autour d’un bon repas agrémenté d’un bon vin, ce que nous avons continué à faire après son départ de la DRAC !
Je garderai de Caroline le souvenir d’une femme de conviction et d’action, forte, engagée, loyale et fidèle.
Clarisse Barthe, responsable du master Édition imprimée et numérique, Département Documentation. Archives, Médiathèque et Édition, Université Toulouse - Jean Jaurès