Céret : les chemins sans retour
Céret avec trois t à la fin, tant l'accent de René Borrat est fort et chantant.
Céret avec trois ponts à l'entrée, l'arche principale en a été supervisée par le diable en personne : vous y êtes.
Céret, bourgade coincée entre le Tech, l'Espagne et les massifs du Canigou ; comme une cale de douelle, encore appelée le diable (je ne l'ai pas inventé) pour une construction harmonieuse, ramassée et solide.
Entrez dans ce livre/cité avec les chemins, anecdotes et leçons de vie de René.
On y parle des Romains, de la cueillette des cerises, des marchés ; des fêtes qui ont un sens, tant la vie y est âpre et le labeur des ouvriers harassant...
On y croise des compagnons formateurs, des instituteurs imbibés de Jules Ferry, les amis disparus, le maquis 44, des aviateurs, des Trabucayres, des toreros...
On y ressent les odeurs, l'eau du canal qui court dans les ruelles, le côté « hors piste » de certains habitants.
Chaque paragraphe très documenté, chaque anecdote est teintée d'une leçon de vie, d'une amertume et surtout d'un espoir, d'un optimisme dans l'autre.
Ce n'est pas un inventaire à la « Prévert », les acteurs sont en symbiose avec les ondes que dégage cette cité ; la période « Mecque du Cubisme » et ses artistes sont au balcon tant les Cérétans occupent les premières loges ; c'est vous dire...
Ce livre est une transmission, un monde disparu sans retour, un regard attendri et annoté, une strate de plus dans l'élaboration de la mémoire.
Entrez dans cette respiration, dans cet accent, dans cette bonté, dans ces couleurs, dans cette description de l'autre sans jamais en médire, entrez y en pleine confiance car le souffle pour puissant et riche qu'il est, est toujours trop court.