La haine de la parole
Auteur(s)
Claude Allione Editeur(s)
Les Liens qui libèrent ISBN
979-10-209-0063-0
EANS
9791020900630
Date
Collation
307p. ; 13 x 22 cm ; épaisseur : 2.2 cm ; reliure : Broché
Nombreuses sont les recherches qui décrivent l'impact du capitalisme
néolibéral sur nos modes de vie, sur la culture, sur les façons de vivre
ensemble, en un mot : sur les sujets. Il est indéniable qu'aucune société
ne saurait se protéger totalement des effets d'une logique commerciale
qui impose sa marque en tant que pratique, mais aussi en tant que
modèle prêt-à-penser. Le marché, le saint-Marché - saint parce qu'il
prétend occuper l'espace de la transcendance - n'agit plus seulement
sur l'acte d'achat. En venant se poser dans une logique de saturation, il
entraîne avec lui tout un dispositif de déni du manque, attaquant ainsi
les racines mêmes de la parole.
Après avoir vécu dans une société de consommation, nous entrons
dans l'ère de la société de saturation qui entraîne, quoi qu'elle en
veuille, une véritable haine de la parole, laquelle se manifeste dans les
faits de discours par la perversion du statut de la parole. Le saint-Marché
a pris la place précise de toutes les transcendances. Il prône une
saturation sans cesse appelée à être dépassée et indéfiniment renouvelable,
totalement antagoniste avec la structure même du langage reposant
sur le manque. C'est ainsi que cette saturation, mode d'action et facteur
de la haine de la parole, agit de fait sur les articulations entre la sphère
symbolique et le réel. Ne le voit-on pas à l'oeuvre dès aujourd'hui dans
l'exercice des «métiers de parole» ? Ceux dont l'outil principal, justement,
est la parole : la justice (attaque des juges par les politiques), la
presse (discréditée, délaissée et parfois se discréditant elle-même à des
fins consuméristes), la sphère «psy» (où le conditionnement voudrait
remplacer la parole), et finalement la politique elle aussi ; et où la capacité
de se référer à un acte de parole est teinté de discrédit qui ne peut
qu'entraîner un esprit de mécréance généralisée.
La haine de la parole explore cette situation en essayant d'en éclairer
les mécanismes, et veut montrer qu'une véritable écologie politique de
la parole est d'une impérieuse nécessité et sans doute d'une grande
urgence.