La Mer Monte

Extrait du recueil "Les Temps qui courent" de Lou Achard © éditions Plaine Page

La mer
Monte

La mer monte
Engloutit
Et goutte
Oui
.

L’eau goutte
L’eau goutte à tout
L’eau s’invite partout
Elle s’infiltre par terre
Elle envahit tes sols
Irise tes champs
Sur tes pieds de blé
Sur tes prés ensablés
Flétrissent les épis
Et flétrissent les haies lasses

La mer monte
.

L’eau
Monte
Lèche les murs
Lèche plaintes
Les interstices
Et pieds de chaise
Laisse sa gravure
Lèche tout corps
Lèche tout ton corps
D’Être trempé
Et envahit

Elle envahit
Envahit
Ta maison
Envahit
Chaque saison
Envahit
Envahit ta
Raison
Envahit des pans entiers
De tes abris
Internes
De tes débris
Éparpillés
De tes mille parties pillées

La mer
Monte
.

La mer monte
Et goutte
Elle goutte en O
Et monte en bas
Elle descend
Et se hisse
Elle se hausse
Et s’immisce
O
Z’ interstices
Elle se soulève
Et te sou-met
La mer fait des mètres
Et des ravages
Quand elle saccage tes côtes
Quand soudainement elle s’abat
Et te brasse
Coulée
Sur des kilomètres
T’inonde
La mer monte
.

La mer monte
Elle s’hémisphère
Et se met au courant
Elle s’énergise
Et se fait vent
Et monte toujours plus
Eaux pôles impudents
Mais l’eau oui
L’eau
Se
Des
Givres
Et se déglace
Elle se salinise
Etcedepartout
Elle dégringole tes falaises
Grignote tes rivages
Et goutte oui
La mer monte
.

La mer
Monte
Oui
Mais presse-ce-que plus
Goutte
Presque plus
Goutte tes terres
Goutte tes entrailles
Puisque
Des airs
Plus d’eau

Désert

Puisque presque plus
Plu
Puisque presque plus
Goutte

Pourtant l’eau
Oui
l’eau
Goutte elle en toi
Goutte ton moi
Ta moelle
Tes organes
L’intérieur de tes os
Eau subterfuge
Elle se dissout
Et se dilate
Elle se disperse
Et te rétine
Elle te bouche
Puis sa vallée
Et t’organe-ise
Elle t’enzyme
Et se lyse
Elle se divise
Et t’ADN-ise
Elle te peau-ise
Et t’indispose
Elle te gouttelle
Et te membrane
Elle te maî-trise
Elle te sous
Mais
Elle te met
O monde
L’eau

Mais l’eau
Oui
Goutte
Presse ce que plus
Presque plus
Goutte tes terres

Goutte tes entrailles
Puisque
Des airs
Plus d’eau

Désert

Puisque
Presque plus plu
Puisque
Presque plus

L’eau

Goutte
.

.

.


Lou Achard © DR

Extrait du recueil Les Temps qui courent de Lou Achard © éditions Plaine Page