Une réflexion sociale au cœur de l'associatif

Article de Ingrid Ledru, librairie Le Livre en fête (Figeac), administratrice d’ALIDO et du Syndicat de la librairie française

Dessin © Julien Revenu

L’Association des librairies indépendantes d’Occitanie (ALIDO) a été créée en 2020, rejoignant ainsi les autres associations régionales de librairies implantées dans la plupart des régions. Nous l’avons développée grâce au bénévolat des libraires, mais avec d’emblée des volontés réunies autour du partage, de la mutualisation, de l’écologie du livre, de l’entraide…

La première action collective a été un partenariat avec l’Association régionale pour l’amélioration des conditions de vie au travail (ARACT) pour accompagner cinq librairies* dans une réflexion sur nos organisations de travail, en associant les gérantes et gérants à l’ensemble du personnel. Après avoir identifié un ou plusieurs sujets, les équipes ont pensé, testé et appliqué des solutions trouvées ensemble. La démarche consiste à reconnaître les expertises des salariés dans la résolution de problèmes d’organisation de travail et à apprendre à penser en équipe. Après un an d’expérience, les lignes ont bougé positivement, malgré des résistances et des doutes inévitables, grâce à l’instauration d’une nouvelle méthode qui reconnaît et associe chacune et chacun à cette entreprise. Les librairies en ont gardé des bénéfices, néanmoins elles font toutes état de la difficulté à maintenir cette méthode, prises dans l’accélération du monde et de notre chaîne du livre. Reconnaître le travail et l’expertise de toutes et tous prend du temps et nécessite d’effectuer un pas de côté dans nos pratiques de libraires, mais tout le monde y gagne : gérantes et gérants, personnel salarié, lectrices et lecteurs, partenaires… L’expérience a ensuite été partagée avec les adhérentes et les adhérents comme avec d’autres structures du livre.

Les ambitions d’ALIDO nous ont rapidement fait comprendre que nous ne pourrions la développer sans créer d’emploi. Même avec une cinquantaine de librairies adhérentes, le modèle associatif bénévole a montré ses limites, humaines et financières. Nous avons envisagé de créer un poste début 2023 : un profil de « couteau suisse » qui accepterait des missions de communication et de coordination, mais aussi de développement d’une association professionnelle, le tout sur un temps partiel, compte tenu de nos capacités financières.

L’idée de l’emploi partagé et l’existence du groupement d'employeurs OPEP ont été une véritable opportunité pour la mise en place de ce poste de coordinatrice d’ALIDO devenu effectif en septembre 2023. Cela a répondu à une difficulté souvent présente dans les métiers de la culture et de l’associatif : la précarité. L’emploi partagé a permis d’offrir une sécurité, un cadre, ainsi que de préserver un niveau de salaire respectueux de la ou du salarié ; et c’était pour nous essentiel.

Mais ce qui doit être souligné dans cette formule, c’est l’idée de partage. Elle incite à développer des compétences transversales, qui servent ensuite à l’ensemble des métiers de la culture, pourtant si diversifiés, et une capacité d’adaptation pour jongler sur des postes différents. Par son écoute et sa connaissance des équipes en œuvre, l’OPEP a su créer la bonne synergie et poser le respect de chacune et chacun, une des conditions nécessaires à la réussite de ce modèle. Les règles sont fixées dès le départ pour toutes les parties, et le dialogue se veut constant. Au bout d’un an, nous envisageons de passer de deux à trois jours, toujours dans
l’idée de nous développer et de pérenniser ce poste à notre échelle, et c’est bien ce que permettent l’OPEP et la mutualisation.